Articles

Violences sexistes et sexuelles : à quand des mesures pour touXtes ?

Ce samedi 26 novembre 2022, plus d’un millier de personneXs se sont rassembléeXs place Graslin, contre les violences sexistes et sexuelles, à l’initiative de plusieurs collectifs nantais. Le constat est sans appel : il est urgent d’agir, mais d’agir vraiment.

Le 25 novembre est désormais une date connue dans l’agenda des luttes contre les violences patriarcales. Cette année encore, la journée internationale de lutte contre les violences sexistes et sexuelles a rassemblé plus d’un millier de personneXs dans les rues de Nantes, alors même que se tenaient à la cité des Congrès, les « Assises Nationales de Lutte contre les violences sexistes et sexuelles », organisées par la Ville de Nantes et Nantes Métropole.

Mais les collectifs en place ce samedi sur les marches de la place Graslin, que les manifestanteXs ont dû partager avec l’énorme sapin de Noël et le manège de fin d’année, ne semblaient pas se satisfaire de cette vitrine antisexiste de la mairie. En effet, les prises de parole des collectifs Paloma, RebooT, CLAC44, Pour une MEUF44 (Pour une Médecine Engagée Unie et Féministe), le Planning Familiale 44, QRAM, Nosig, Féministes Révolutionnaires Nantes et des Colleuxses Nantes ont martelé l’importance de comprendre les violences sexistes et sexuelles comme appartenant à un système capitaliste, raciste et patriarcal.

Les prises de parole ont mis en partie ce système en lumière, en s’appuyant sur des chiffres précis, qui permettent de « comptabiliser » les violences sexistes et sexuelles, les violences qu’on pourrait « quantifier » pour, dans un second temps, lutter contre. Ces chiffres sont vertigineux, tant ils illustrent l’omniprésence des violences sexistes et sexuelles, et l’inaction généralisée de la société pour activement les prévenir.

Mais les prises de paroles listent aussi les autres violences, celles exercées contre les personneXs sexiséeXs mais qui sont peu visibilisées, voire totalement niées : la violence générée par la précarité des emplois dans les secteurs professionnels essentiels, mais non valorisés financièrement et symboliquement; la violence du travail gratuit, pris en charge bien souvent par les personneXs sexiséeXs; la violence du gouvernement qui entend finalement faire passer la réforme des retraites, malgré les mobilisations massives des travailleureuseXs en 2019; la violence de demander aux personneXs déjà les plus pauvreXs et précaireXs de « faire des efforts » et de se serrer encore un peu plus la ceinture, alors qu’on ne demande rien aux ultrariches qui peuvent continuer de faire voler leurs jets privés; la violence de la récupération raciste et nationaliste du combat de femmes et d’hommes luttant pour leur liberté, en Iran et en Afghanistan.

La violence d’empêcher les travailleureuseXs du sexe d’exercer leur métier dans des conditions dignes et de manière sécurisée. La violence du monde médical qui discrimine, maltraite et violente encore davantage les personneXs grosseXs, les personneXs raciséeXs, les personneXs trans, les personneXs handicapéeXs, les personneXs intersexes. La violence de voir son identité et son orientation sexuelle discutée, médicalisée, psychiatrisée. La violence de se voir refuser son accès à l’IVG, de le voir remis en question ou débattu et de constater le manque de moyens déployés pour que l’acte médical soit vraiment rendu accessible à tousteXs. La violence de la criminalisation exponentielle des militanteXs nantaiseXs, par une mairie dite de gauche.

C’est après ces prises de paroles claires, déterminées et fortes que le cortège s’est mis en mouvement. Il est alors plus de 15h et, pas de chance pour la lutte contre les violences sexistes et sexuelles, les marchés de Noël des places Royale et Bouffay sont bondés. Petits chalets, saucissons secs, boutiques et courses de fin d’année : il ne faudrait surtout pas venir perturber cette joyeuse démonstration de liesse consumériste. Le cortège emprunte donc la rue Jean-Jacques Rousseau, puis se retrouve confiné le long des voies de la ligne de tram 1, entre les travaux au niveau de la place du Commerce et le cours Franklin Roosevelt.

Alors que les Assises Nationales de Lutte contre les violences sexistes et sexuelles battent elles aussi leur plein à la Cité des congrès, on pourrait avoir l’impression, à déambuler dans ce petit goulot, que les manifestanteXs ne font pas la fierté de la ville. Pourtant iels portent des messages forts et des revendications claires. Tant pis, iels marchent alors sur les voies de tram, se faisant ainsi entendre des quelques usagèreXs qui attendent aux arrêts.

Vers 16h30, le cortège emprunte la rue de Strasbourg, avant de finir la manifestation au niveau de la préfecture et du cours des 50 Otages. Si le dispositif policier était presque inexistant lors de la manifestation, il est à noter que plusieurs contrôles d’identité ont eu lieu en fin de manifestation. Le fichage des manifestanteXs est bien la signature de la préfecture nantaise.

Telle est l’hypocrisie des politiques à ce sujet : d’une main, faire croire qu’on se saisit d’un problème de société en organisant en grande pompe des « Assises Nationales de Lutte contre les violences sexistes et sexuelles », de l’autre punir et surveiller celleuX qui les dénoncent et en sont les premièreXs victimeXs.

Temps de travail :
– prise de son : Rustine, 2h
– prise d’images : San, 2h
– rédaction de l’article : Rustine, 2h
– montage podcast : Rustine, 1h30
– sélection et traitement des photos : San, 2h
– relecture et correction : Luth, 50min

Vous pourriez également aimer...